Né dans le Lancashire en 1978, l'Anglais Tony O'Neill devient très jeune le pianiste de Marc Almond.

De fil en aiguille, il s'initie à l'héroïne en Californie. Déchéance à Los Angeles et mariage à Las Vegas, la rock-star accro au caillou fond comme neige au soleil. Avec The Brian Jonestown Massacre, l'icône icarienne se la joue Orphée aux amphés. Désintox à répétition et dégringolades en cascade, puis grand amour et grands livres : Digging the Vein, Songs from the Shooting Gallery, Down and Out on Murder Mile...
Tony vit aujourd'hui à New York avec Vanessa et Nico.

"Maintenant que je suis un mari, un père et un écrivain, il y aura toujours quelque pan en moi ce gamin de dix-neuf ans paumé, en manque, qui attendait jadis son dealer à un coin de rue. Waiting. Always waiting... ".



Biographie

Tony O’Neill est né à Blackburn (Lancashire), le 13 juillet 1978.
À 18 ans, ce garçon rangé répond à une annonce du Melody Maker et s’initie à la folle vie londonienne en devenant le pianiste de Marc Almond (1997-1998) puis de Kenickie (1997-8), groupe de filles qui lui fait découvrir Los Angeles en tournée. Nouveau choc ! « Au bout d’un an, j’étais devenu l’un de ces cinglés que j’avais remarqués en arrivant. » Il tâte de l’héroïne, tombe accro, part épouser une toxico à Las Vegas, rejoint fugitivement le groupe du charismatique rocker Anton Newcombe, The Brian Jonestown Massacre (2000), puis Kelli Ali (2001-2004). Il regagne l’Angleterre avec une deuxième épouse, sa déchéance se confirme, il fréquente les centres de réadaptation et est sauvé in extremis par Vanessa, sa troisième et « vraie » femme, avec qui il ira s’installer à New York où ils élèvent leur petite fille, Nico.

En tout, une descente aux enfers d’une dizaine d’années, pendant lesquelles ce trentenaire aura vécu beaucoup de vies. O’Neill en rend compte dans des œuvres ouvertement autobiographiques tels les romans Digging the Vein (Contemporary Press, 2006) – que le journaliste Jesper Sydhagen a jugé supérieur au fameux Junky de William Burroughs pour son évocation réaliste de l’héroïnomanie – ou Down and Out on Murder Mile (Harper, 2008). O’Neill a aussi écrit et publié des poèmes, sous l’influence d’abord d’Allen Ginsberg, puis de Bukowski, Rimbaud, Snyder, Giorno, puis de Saroyan, Trantino...

O’Neill n’est pas un camé qui écrit mais un écrivain qui s’est camé. Révolté contre la société matérialiste occidentale, il s’y voit, en tant qu’écrivain, comme un « correspondant de guerre ». Ses auteurs favoris sont Hemingway, notamment pour les nouvelles, Samuel Beckett, Alexander Trocchi, Noah Cicero, Tommy Trantino, Frederick Exeley, Herbert Huncke, Dennis Cooper, Dan Fante, Irvine Welsh… Il se décrit comme une « éponge », mais l’empreinte prépondérante est peut-être celle de Burroughs père et fils – « deux auteurs extraordinaires. Avec Cain’s Book [1960] de Trocchi, Junky [1952] demeure à mes yeux le meilleur livre jamais écrit sur l’héroïnomanie. » D’une veine, si l’on peut dire, moins autobiographique et plus expérimentale, The Naked Lunch (Le Festin nu) de Burroughs est le roman américain préféré d’O’Neill, qui assume son influence, sinon formelle, du moins intellectuelle. Il voit en Burroughs Junior, découvert tardivement dans un centre de désintoxication, à la fois le continuateur des œuvres de jeunesse de Burroughs Senior et le précurseur de Bukowski, Dan Fante etc.

Tony O’Neill est membre fondateur des Brutalists, collectif né en 2006 et comprenant deux autres auteurs du Nord de l’Angleterre, Adelle Stripe et Ben Myers. Une particularité de ce mouvement est d’avoir été lancé par l’intermédiaire de MySpace. Il fut sans doute le premier à l’être ; son ambition est de produire une littérature le moins littéraire et le plus « brute » et sincère possible, dans la pure tradition punk. Outre les œuvres de Tony O’Neill, se revendiquent de cette philosophie le blog publié par Adelle Stripe, Straight from the Fridge, ainsi que The Book Of Fuck ou The Missing Kidney, par Ben Myers. La première publication « officielle » du trio est un recueil de quinze poèmes intitulé Nowhere Fast (Captains of Industry Press, 2007), illustré par Lisa Cradduck. Selon O’Neill, « Le brutalisme est le lieu de rencontre de la poésie traditionnelle et du rock punk. » C’est une approche expérimentale et libératrice de l’écriture, permise par Internet, au-delà des inhibitions culturelles ou des carcans de l’édition traditionnelle. « Stagner, c’est mourir », ajoute notre auteur dans une interview.

De plus en plus de membres de la communauté du site de networking MySpace s’intéressent à ce nouveau genre littéraire. À l’avant-garde du chamboulement de la littérature imprimée à la demande – diffusée par Internet –, et du combat contre les auteurs « officiels » et l’étouffante ironie postmoderne stigmatisée par l’ambigu Andy Warhol, on trouve Heidi James, 36 ans en 2009, patronne et employée du site Social Disease – petite entreprise au nom inspiré par une boutade de Warhol : « I have social disease. I go out every night. » Heidi permet à des auteurs tels que Paul Ewen de s’exprimer. Les livres qu’elle édite sont disponibles chez Amazon, par exemple Seizure Wet Dreams, un recueil de poèmes de Tony O’Neill ; néanmoins, le premier roman de Heidi James elle-même, Carbon, doit être publié par une maison d’édition plus traditionnelle, Wrecking Ball Press.

Parmi les principaux mouvements littéraires radicaux comptant de nombreux « amis en ligne » – notamment des figures de la contre-culture tels Dan Fante ou Billy Childish –, on trouve, à part nos Brutalists ou encore le collectif Riot Lit, l’Offbeat Generation,pareillement portée sur Huysmans, Bukowski et la dive bouteille. D’après son porte-parole Andrew Gallix, rédacteur en chef du magazine littéraire en ligne 3:AM, l’âge de ses auteurs s’échelonne de 18 à 40 ans ; l’O. G. réunit des gens qui se sentent « aliénés dans un monde éditorial dominé par le marketing ». Les Brutalists souscrivent au même point de vue ; ils précisent dans leur manifeste en ligne : « Nous ne sommes pas anti-intellos ou anti-littéraires, seulement anti-apathie. »

Ces mouvements cousins sont de plus en plus présents sur le Net. Parmi les auteurs qui montent, retenons les noms de Heidi James, Matthew Coleman, Ben Myers, Tom McCarthy, H. P. Tinker, Andrew Gallix… et d’abord, bien sûr, Tony O’Neill. Tout expérimental et provocateur qu’il se veuille, il est sorti des ghettos (junkie, cyber etc.) en maîtrisant habilement des codes narratifs traditionnels qui, donnant une résonance universelle à son expérience singulière, le rendent accessible à un large public.


Bibliographie

Digging The Vein (2006)
Notre Dame du Vide (2009) 

Seizure Wet Dreams (2006) 

Songs From The Shooting Gallery (2007)

Down And Out On Murder Mile (2008)
Derniere Descente à Murder Mile (2010)


Hero Of The Underground (2008)

Neon Angel - A Memoir Of The Runaways (2010)

Sick City (July 2010)